La recherche

LA RECHERCHE ET LE CORONAVIRUS : un vrai feuilleton !

Saison 2 : La recherche pour traiter la Covid-19

L’année 2021 a commencé et le coronavirus court toujours, même de plus en plus vite avec les nouveaux variants. Malgré le foisonnement des essais cliniques depuis le début de la pandémie, aucun traitement n’a encore fait ses preuves pour guérir de la maladie, la Covid-19. En revanche, la recherche sur les vaccins a porté ses fruits : l’un après l’autre, ils sont autorisés en Europe et en France, offrant à tous une lueur d’espoir dans la tempête.

En ce début d’année 2021, nous vous proposons un panorama sur les traitements utilisés actuellement dans la prise en charge de la Covid-19 et sur les essais cliniques, suspendus et en cours.

Parmi les personnes diagnostiquées pour la Covid-19, moins de 10 % font une forme sévère nécessitant une hospitalisation, environ 1 % entrent en service de réanimation, le taux de mortalité étant de l’ordre de 2 %1.

90 % des personnes infectées par le virus font donc des formes asymptomatiques ou légères, dont les symptômes pseudo-grippaux (fièvre, courbatures, maux de tête) sont sensibles au paracétamol (les anti-inflammatoires non stéroïdiens du type ibuprofène sont à éviter, sauf s’ils étaient déjà prescrits pour une autre maladie).

Pour sortir de la pandémie et de ses conséquences, il faut agir sur deux leviers : diminuer la transmission du virus d’un individu à l’autre, grâce à la vaccination qui agit aussi sur le second levier, réduire la proportion de formes graves et la mortalité liées au virus. C’est à cela que s’attelle la recherche clinique dans le monde entier depuis des mois, avec des espoirs qui, bien que souvent déçus jusqu’à présent, donneront lieu à n’en pas douter à une/des solution(s) efficaces : le site ClinicalTrials.gov recense à ce jour près de 3 000 essais cliniques en cours sur la Covid-19 !

1 – Agir sur les formes modérées à sévères

 

C’était l’objectif des équipes qui ont testé l’hydroxychloroquine dans le monde entier. Cette molécule est susceptible d’inhiber in vitro la pénétration intracellulaire du virus mais une méta-analyse de 29 études internationale a conclu à son inefficacité sur la mortalité par Covid-192. Un effet “préventif” éventuel a également été étudié chez plus de 30 000 patients prenant de l’hydroxychloroquine pour traiter une polyarthrite rhumatoïde ou un lupus. Aucune différence significative sur le taux de mortalité lié à la Covid-19 n’a été observée entre le groupe “avec” hydroxychloroquine et le groupe “sans”3.

Espoir avec la colchicine ?

La colchicine est un anti-inflammatoire très puissant utilisé dans les crises de goutte pour soulager la douleur et l’inflammation. Elle suscite un nouvel espoir depuis la publication le 23 janvier 2021 par une équipe canadienne des résultats de l’étude ColCorona menée en Amérique, en Europe et en Afrique sur plus de 4 000 personnes tout juste diagnostiquées, non hospitalisées, qui ont reçu la molécule ou un placébo pendant 30 jours. La colchicine, en agissant sur l’orage cytokinique, réduirait le taux d’hospitalisation de 25 % et celui de décès de plus de 40 %. Mais comme pour l’hydroxychloroquine, avant de s’enflammer il faut attendre que les résultats complets soient publiés dans une revue à comité de lecture et que cette annonce soit validée par la communauté scientifique.

Les anticorps monoclonaux

Ce sont des anticorps de synthèse, dirigés -comme ceux que l’organisme humain fabrique- contre la protéine S qui recouvre le virus et lui permet de pénétrer dans sa cellule-hôte.

Selon des résultats préliminaires, la combinaison de deux d’entre eux (développés par le laboratoire Lilly) réduirait de 70 % le nombre d’hospitalisations et de décès chez des patients à haut risque lorsqu’ils sont administrés en tout début d’infection. L’un des deux, employé seul, préviendrait -comme un vaccin- le risque d’infection jusqu’à 80 % et bénéficie déjà aux États-Unis d’une autorisation temporaire d’urgence comme traitement pour les patients à haut risque atteints de Covid léger à modéré.

C’est également l’indication d’un traitement similaire (développé par le laboratoire Regeneron) composé de deux anticorps synthétiques qui a bénéficié de la promotion qu’en a faite Donald Trump avant d’être autorisé en novembre par la FDA (Food and Drug Administration). Les résultats préliminaires annoncent une réduction de 50 % du taux d’infection avec ou sans symptômes.

L’Allemagne a annoncé en janvier vouloir autoriser ce type de traitements et la France va les intégrer dans l’essai clinique Discovery. Si des publications scientifiques confirment -comme ces communiqués de presse- que ces anticorps monoclonaux réduisent la charge virale, y compris sur certains variants, ainsi que les hospitalisations et les décès, leur usage risque d’être cependant limité par leur mode d’administration (par perfusion) et par leur coût très élevé.

2 – Agir sur les formes graves nécessitant une hospitalisation

 

Les médecins n’ont actuellement à leur disposition que des médicaments qui calment le système immunitaire, aucun qui attaque le virus. Actuellement, la prise en charge des patients hospitalisés recommandée par l’OMS repose seulement sur l’oxygénothérapie, les corticoïdes (dexaméthasone) et l’administration d’anticoagulants pour éviter la formation de caillots. Ce protocole permet de réduire la mortalité de 20 %.

Les antiviraux

Initialement très prometteurs (lopinavir/ritonavir, hydroxychloroquine/azithromycine, remdésivir), ils n’ont pas pu prouver leur efficacité, à tel point que les études les concernant dans l’essai européen Discovery ont été arrêtées.

Les immunosuppresseurs

L’anakinra, anti-IL1 fréquemment prescrit dans l’arthrite juvénile et la maladie de Still (Kineret®), testé dans le cadre de l’essai Corimuno, n’a pas amélioré l’évolution des patients hospitalisés sous oxygène. De même pour le tocilizumab, un anti-IL6 utilisé sous le nom de RoActemra® depuis 2006 dans la polyarthrite rhumatoïde, qui a donné lieu à plusieurs études et à des résultats contradictoires : la dernière étude parue le 20 janvier 2021 dans le British Journal of Medicine sonne probablement le glas de cette molécule, avec une inefficacité par rapport au placébo et même une mortalité augmentée dans le groupe “tocilizumab”.

Parmi les inhibiteurs de JAK utilisés comme traitement de la polyarthrite rhumatoïde, le baricitinib (Olumiant®) suscite l’intérêt du fait d’un effet combiné anti-cytokines et antiviral. Une étude récente4 réalisée sur un petit échantillon de sujets fait état de résultats intéressants sur la mortalité, nécessitant des essais cliniques.

3 – Et les autres pistes ?

 

La vitamine D

De même que d’autres publications dans le monde, la Revue du Praticien a publié le 8 janvier 2021 une tribune signée par 73 experts, dont des rhumatologues, 5 sociétés savantes et l’AFLAR (Association française de lutte anti-rhumatismale) appelant à une supplémentation générale de la population en vitamine D. Celle-ci fait état du fait que la concentration en 25(OH)D (vitamine D circulante) est plus basse chez les adultes infectés par la Covid-19 que chez les autres et fait « l’hypothèse que les personnes ayant un statut satisfaisant en vitamine D sont mieux armées pour ne pas développer la maladie ». Les experts observent en outre que les personnes les plus à risques de carence en vitamine D (âge avancé, obésité, maladies chroniques) sont aussi celles les plus à risque de formes graves de Covid. Ils rappellent l’effet de la vitamine D sur l’immunité et sur l’inflammation et proposent un essai randomisé contrôlé, COVIT-TRIAL, pour étudier l’effet de la vitamine D sur la survie des patients hospitalisés pour Covid-19.

Le 28 janvier, le site Vidal.fr fait un état des lieux sur ce thème : il confirme l’effet préventif de la vitamine D contre les infections respiratoires aigües en général (sans s’engager sur la Covid) et conseille de veiller au statut vitaminique des personnes vulnérables dans le respect des valeurs habituelles (> 30 ng/mL chez les patients à risque d’ostéoporose) en mentionnant les risques de calculs rénaux en cas de surdosage prolongé (> 50-60 ng/mL). Il précise que deux essais contrôlés randomisés n’ont pas montré d’effet de la vitamine D sur la durée d’hospitalisation et la mortalité. L’auteur conclut à la justification des recommandations visant à s’assurer des concentrations sanguines en vitamine D (non remboursable en l’absence de facteurs de risques de carence) et à recommander, en cas de déficit avéré, une prise quotidienne ou hebdomadaire de vitamine D. Enfin, il conclut sur l’absence de justification à ce jour de prescrire de fortes doses de vitamine D chez les personnes souffrant de Covid-19, avec ou sans hospitalisation.

Le plasma de patients convalescents

Les personnes ayant contracté la Covid-19 développent des anticorps contre le SARS-CoV-2, d’où l’idée de transfuser à des malades du plasma prélevé sur des personnes ayant été contaminées et guéries. La méthode a été autorisée en Inde, aux États-Unis et testée en France depuis avril 2020 dans l’étude Coviplasm, pilotée par l’AP-HP (Pr Karine Lacombe) et l’Inserm. L’étude indienne a montré une baisse de la quantité de virus circulant mais aucun bénéfice clinique pour les patients. Les autres études sont toujours en cours

Et puis ?

D’autres pistes de traitements sont en cours : le molnupiravir (un antiviral efficace chez le furet), l’ivermectine (un antiparasitaire), la fluoxétine (Prozac®), le Xav-19, un anticorps polyclonal développé par un laboratoire nantais… et bien d’autres encore ! À suivre…

Date : 10/02/2021

Références :

  1. santepublique.fr
  2. Clinical Microbiology and Infection 27 (2021) 19-27
  3. The Lancet Rheumatology (2021) 3(1) e2-e3
  4. Science Advances (2021) 7(1):eabe4724

Sources : ClinicalTrials.gov, egora.fr, mediscoop.net, JIM.fr, rhumato.net